30th ECNP Congress – Paris 2017
Latest findings in the neurobiology of borderline personality disorder 
Conférencier(s) : Marina Diaz-Marsa (Université Madrid), Barbara Stanley (Columbia University, New York)

Les points forts :

  • Les psychothérapies restent les traitements de fond des troubles de personnalité borderline.
  • Garder les patients en thérapie est un problème commun à toutes les prises en charge.
  • Les objectifs thérapeutiques ne sont pas de changer la structure de personnalité, mais d’aider les sujets à surmonter certains symptômes cibles.

Marina Diaz-Marsa (Université de Madrid) et Barbara Stanley (Columbia University, New York) ont exposé les dernières avancées cliniques, neurobiologiques et thérapeutiques rencontrées chez les sujets présentant des troubles de personnalité borderline. Devant l’impossibilité d’avoir une vision globale, compte-tenu de la grande variabilité des sujets rencontrée en pratique, les travaux récents ont surtout porté sur certaines dimensions caractéristiques des troubles de personnalité borderline, en particulier la dysrégulation émotionnelle, l’impulsivité, les niveaux d’ocytocine et potentiellement des phénomènes inflammatoires.

Neurobiologie des troubles de personnalité borderline (M. Diaz-Marsa)

Dysrégulation émotionnelle : la régulation émotionnelle permet de moduler les émotions, en particulier de réduire la souffrance émotionnelle lors des traumas psychologiques. Elle est étroitement corrélée aux capacités cognitives. Chez les patients présentant des troubles de personnalité borderline, plusieurs études ont retrouvé des corrélations entre dysrégulation émotionnelle, hyperactivation amygdalienne et réduction de l’activation des cortex préfrontaux et du cortex cingulaire antérieur.

Impulsivité : l’impulsivité, caractéristique des troubles de personnalité borderline, est étroitement liée aux réponses émotionnelles (impulsivité émotionnelle). Les études d’imagerie, notamment d’IRM fonctionnelle ont retrouvé là encore des corrélations entre impulsivité, hyperréactivité émotionnelle et réduction de l’activation du cortex préfrontal et du cortex cingulaire antérieur (1). Les études d’imagerie structurales ont retrouvé une réduction du volume de la substance grise de l’amygdale, de l’hypothalamus et une réduction du volume de substance blanche au niveau du cortex préfrontal. En condition de repos l’activité cérébrale est décentralisée, avec une dispersion de l’activation. En IRMf et spectroscopie, les patients présentant des troubles de personnalité borderline présentent une réduction de l’activation du cortex cingulaire antérieur lors de tâches d’inhibition Go/noGo, corrélée à des niveaux élevés d’impulsivité et à une réduction des niveaux de GABA cérébraux.

Ocytocine : Les niveaux d’ocytocine sont diminués chez les patients présentant des troubles de personnalité borderline en cas de relations interpersonnelles très dysfonctionnelles. Ils sont corrélés avec l’existence de traumatismes survenus dans l’enfance (2).

Inflammation : l’inflammation est liée aux stress intense et diffus (3). Des marqueurs inflammatoires tels que COX-2, INOS, des marqueurs de stress oxydatif et des taux plasmatiques élevés de cytokine IL1β ont été retrouvés chez les patients présentant des troubles de personnalité borderline.

Traitements des troubles de personnalité borderline : ils posent un certain nombre de problèmes en pratique quotidienne et retrouvés dans les études :
  • Comorbidités psychiatriques fréquentes
  • Cibles thérapeutiques hétérogènes
  • Hétérogénéité du diagnostic
  • Difficultés de définir la longueur des essais
  • Critères d’exclusion, nombreux, limitant la généralisation des résultats. Par exemple, les essais thérapeutiques excluent les patients suicidaires, alors que 38 à 73% des patients ont réalisé une ou des tentatives de suicide et que 10% des patients meurent par suicide
Évaluation de l’efficacité des médicaments : ceux-ci ne sont certes pas efficaces pour modifier la structure de personnalité borderline (4). En revanche, plusieurs essais cliniques ont retrouvé que certains médicaments psychotropes pouvaient avoir une certaine efficacité pour atténuer certains symptômes cibles rencontrés dans les troubles de personnalité borderline :
  • Les problèmes interpersonnels peuvent être atténués avec l’aripiprazole, le valproate et le topiramate.
  • La dysrégulation émotionnelle peut être atténuée avec l’aripiprazole, l’olanzapine, l’halopéridol, le topiramate, la lamotrigine et le valproate.
  • Les symptômes psychotiques sont atténués avec l’aripiprazole et l’olanzapine,
  • Les sentiments de colère peuvent être atténués avec l’aripiprazole et la lamotrigine.
  • Les antagonistes opiacés pourraient avoir un intérêt, mais modeste.
  • En revanche, aucune étude n’a retrouvé d’efficacité des médicaments psychotropes pour les sentiments d’abandon, les sensations de vide, les troubles de l’identité et la dissociation.
  • Le niveau de preuves est faible pour les médicaments antidépresseurs, sauf en cas de dépression associée.
  • Très peu d’études ont évalué l’efficacité d’associations de médicaments.
Évaluation de l’efficacité des psychothérapies
  • Les thérapies dialectiques sont efficaces pour réduire les sentiments de colère, les comportements suicidaires et les symptômes thymiques.
  • La thérapie basée sur la mentalisation (Mentalization based therapy), de Peter Fonagy, vise à identifier et explorer les pensées et les sentiments des autres. Elle serait notamment efficace pour réduire les comportements suicidaires, les problèmes interpersonnels et les symptômes thymiques.
  • La psychothérapie focalisée sur le transfert (Transference focused therapy), d’Otto Kernberg, est efficace pour réduire la sévérité des troubles de la personnalité borderline.
  • La thérapie des schémas (Schema focused therapy) est efficace pour réduire les pensées négatives et la sévérité globale des troubles.
  • Les STEPPS (Systems Training for Emotional Predictability and Problem Solving), fondée sur la résolution de problèmes est efficace pour réduire les problèmes interpersonnels et les phénomènes dissociatifs.
  • Les interventions de crise n’ont pas vraiment été évaluées.
À l’avenir : les études de ces troubles de personnalité devraient approfondir les aspects génétiques. Des études de Genome-wide association study (GWAS) ont en effet retrouvé une association entre troubles de personnalité borderline et gènes de la dihydropyrimidine dehydrogenase (DPYD) et de la plakophiline 4 (PKP4). Une autre voie intéressante est l’étude de l’empathie affective qui pourrait être liée à une hyperactivation amygdalienne et de l’empathie cognitive qui pourrait être liée à une réduction de l’activation du gyrus temporal gauche (5).