Facteurs neuro-cognitifs de prédiction d’une transition psychotique

Marie-Odile KREBS (Paris) a souligné que l’objectif du repérage précoce des sujets à risque de transition psychotique était de raccourcir la durée des troubles psychotiques non traités, avant qu’ils ne se compliquent, notamment par un décrochage scolaire, des conduites addictives, des comportements suicidaires… Rentrent dans ce cadre les sujets à haut risque de transition psychotique ou Ultra High Risk (UHR), les patients « prodromiques » (prodromal states) et les patients à haut risque clinique (Clinical High Risk). Plusieurs outils de repérage ont été élaborés ces dernières années, par exemple l’Attenued Psychotic Symptoms (APS), la Brief Limited Intermittent Psychotic Episodes (BLIP), le Genetic Risk and Deterioration Symptoms (GRD), le Basis Symptoms (BS) (vécu subjectif de dysfonctionnement).

 Les altérations cognitives retrouvées dans la schizophrénie surviennent très précocement chez les patients et ont un impact majeur sur la qualité de vie. Une méta-analyse récente des études évaluant le devenir de sujets à haut risque (UHR) a retrouvé des altérations de la fluence verbale et de la mémoire plus marquées chez les sujets qui ont évolué vers des troubles psychotiques par rapport à ceux qui n’ont pas fait de conversion (1).

Il y a actuellement un consensus dans la littérature pour reconnaître que ces déficits cognitifs,  touchant mémoire de travail, attention, organisation et planification, sont des marqueurs traits, stables, des populations UHR. Ces marqueurs cognitifs sont potentiellement liés à des facteurs génétiques et développementaux. Cependant, il faut souligner que, majoritairement, les études se sont intéressées à la cognition « froide », telle qu’elle peut être évaluée avec la batterie de tests MATRICS par exemple. Malheureusement, peu d’études ont évalué la cognition sociale.

En revanche, il n’y a pas de consensus sur la nature des altérations cognitives en jeu. Les résultats les moins consensuels concernent la mémoire visuelle, la mémoire verbale et la mémoire de travail. Par exemple, une étude parisienne n’a retrouvé que des détériorations de la fluence verbale sémantique chez des sujets UHR (2). L’originalité de cette étude était que les sujets UHR n’étaient pas comparés à des sujets témoins sains, mais à des sujets demandeurs de soins pour des difficultés psychologiques, plus proches des réalités cliniques quotidiennes. L’enjeu d’établir des profils cognitifs est de mieux cerner des processus pathologiques particuliers et d’identifier des sous-groupes de patients (3).

Aspects prédictifs de transition vers la psychose en neuro-imagerie

Mohammed Taleb (Vernon) a rapporté les données des études d’imagerie dans des populations de sujets à haut risque de transition psychotique. Ces études ont indiqué que les anomalies neurobiologiques retrouvées chez les patients schizophrènes étaient déjà présentes chez les sujets à haut risque, notamment des anomalies du cortex temporal (4).

Une méta-analyse récente de 25 études (5), comprenant 385 sujets à haut risque de transition psychotique UHR, a notamment retrouvé que les anomalies structurelles de la substance grise les plus prédictives étaient localisées au niveau des régions temporales médianes, préfrontales, cingulaires antérieures, du gyrus temporal supérieur et de l’insula. Au niveau de la substance blanche, les anomalies les plus fréquentes étaient situées au niveau des régions frontales gauches (6).

Alain Dervaux, Paris