Etudes d’imagerie multimodales dans la schizophrénie
Les études d’imagerie multimodales utilisent simultanément des techniques structurales, fonctionnelles et métaboliques. Schultz et al. (Jena University, Munich, Allemagne) ont souligné que ces techniques allaient toutes dans le sens de l’existence d’anomalies des cortex préfrontaux dans la schizophrénie.
Nancy Andreasen avait élaboré dans les années 1990 le concept de dysmétrie cognitive, caractérisé notamment par des altérations de connectivité des circuits fronto-cingulo-thalamo-cérebelleux. Dans cette perspective, Koch et al. (Jena University, Munich, Allemagne) ont retrouvé en IRM à tenseur de diffusion et en imagerie utilisant des techniques de Dynamic Causal Modeling, des anomalies structurelles de l’aire cingulaire antérieure, associées à des anomalies de la connectivité fronto-thalamique dans un groupe de 38 patients schizophrènes (âge moyen : 27 ans) par rapport à des sujets témoins (Wagner 2013). Ces études suggèrent que l’interruption de la connectivité fronto-thalamique serait localisée précisément au niveau de la partie antérieure de la capsule interne (faisceau de matière blanche reliant le thalamus et le noyau caudé).
Pelaniyappan et al. (Nottingham University) ont retrouvé que les anomalies de la connectivité retrouvées dans la schizophrénie pouvaient être liées à une diminution du nombre de neurones à longue distance (plus de 75 millimètres) décrits par Dosenbach et al. en 2010 (Guo et al. 2014). Ceux-ci se développent surtout à l’adolescence, âge ou débutent généralement les troubles psychotiques. Ces anomalies sont plus marquées chez les patients que chez les sujets témoins, les apparentés présentant des anomalies intermédiaires.
Etudes d’imagerie chez les sujets à haut risque de troubles psychotiques
P. Fusar-Poli (King’s College, Londres) a rapporté les résultats d’une méta-analyse confirmant l’existence d’anomalies cognitives, en particulier de la fluence verbale, chez les sujets à haut risque de troubles psychotiques (UHD : Ultra High Risk) (Fusar-Poli et al. 2012). Ces anomalies sont associées à des anomalies du cortex préfrontal, notamment au niveau du gyrus médio-frontal et du gyrus frontal inférieur (Fusar-Poli et al. 2009). D’après une méta-analyse de 11 études de PET-scan, elles pourraient correspondre également à une augmentation de la transmission dopaminergique, d’environ 14 %, au niveau du striatum, comme c’est le cas dans la schizophrénie (Fusar-Poli et al. 2012). Une diminution des niveaux de glutamate au niveau du thalamus a aussi été retrouvée chez les sujets à haut risque, associée à des altérations fonctionnelles des régions préfrontales, hippocampiques, de l’aire cingulaire antérieure et du thalamus (Fusar-Poli et al. 2011). Ces résultats sont cependant limités par des biais possibles, en particulier l’existence de troubles dépressifs chez 41 % de ces sujets.
S. Borgwardt (Université de Bâle) a rapporté que le taux de transition des sujets à haut risque de troubles psychotiques était de 35,8 %, d’après une revue systématique d’études sur le sujet. Plusieurs anomalies neurobiologiques précèdent les premières manifestations cliniques psychotiques, notamment une diminution du volume de substance grise au niveau des structures parahippocampales gauches. La consommation de cannabis serait associée à une perte de substance grise accentuée au niveau du cortex cingulaire (Rapp et al. 2012). Les techniques de Dynamic Causal Modeling ont permis de mettre en évidence des anomalies de la connectivité au niveau du gyrus médio-frontal et du lobe pariétal droits, associées à des troubles de la mémoire de travail chez les sujets à haut risque et les patients présentant un premier épisode psychotique (Schmidt 2013). Ces anomalies semblent atténuées par les traitements antipsychotiques reçus par les patients après transition psychotique. Certains patterns neurobiologiques seraient prédictifs de transition psychotique et pourraient avoir des applications pratiques dans un futur plus ou moins proche (Koutsouleris et al. 2012).

Alain Dervaux
Paris