Un peu moins d’escales dans les symposium et les débats cette année, une présence soutenue dans les forums, la psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent prend le temps de revenir sur des sujets atemporels et d’explorer les questions nouvelles, brûlantes d’actualité ou prises dans l’évolution sociale contemporaine. Des choses à connaître et comprendre, des résultats d’études gardant un contact étroit avec les pratiques, un souci permanent du soin dont les équipes rendent compte et interrogent inlassablement la portée.

Le temps de la petite enfance, inscription éternelle de l’existence

Au forum de la WAIMH (Word Association of Infant Mental Health), on suit les traces d’Esther Bick dont la méthode d’observation s’est développée dans les lieux d’accueil des très jeunes enfants. Autre pensée inscrite dans le courant de la psychanalyse, autre clinicien et théoricien d’envergure, l’empathie métaphorisante de Serge Lebovici est mise en lien avec la notion plus récente d’empathie développementale (FA08).

En grandissant les enfants d’EDEN et ELFE nous révèlent peu à peu l’incidence des facteurs de risques liés à la grossesse et la petite enfance. Enfance fragilisée, enfance protégée aussi dont les atouts de résilience sont retenus cette année dans le symposium ouvert aux travaux de ces deux cohortes phares de l’épidémiologie psychiatrique en France (S10). Un forum (FA17) abordera lui spécifiquement les bénéfices et risques des psychotropes pendant la grossesse.

Certains n’ont que quelques mois, d’autres quelques années, ils reviennent des zones de combat irako-syriennes et des équipes psychiatriques ont été sollicitées pour prêter une attention à leur retour en France. Expérience difficile au regard de ce que certains ont vécu, questions cliniques et éthiques, investissement et contre-attitudes, le témoignage d’une équipe de référence sur les thématiques sociales et transculturelles est un temps fort de ce congrès (R01).

Le temps des écoliers, prendre soin d’apprendre, à tous

La Fondation Santé des Étudiants de France accomplit dans plusieurs établissements un travail essentiel permettant à des enfants et des adolescents atteints de pathologies somatiques et psychiques de poursuivre leur scolarité dans un environnement soignant. Nous avons un cruel besoin de places ou de dispositifs pour accueillir ces élèves empêchés pour diverses raisons de poursuivre leurs études “normalement”. Penser le soin dans le contexte scolaire, penser le scolaire comme espace possible du soin, travailler en complémentarité et en transdisciplinarité, forts d’une expérience de 50 ans, les collègues de la FSEF viennent transmettre et partager leur style d’accompagnement des élèves (FA13).

De l’école au monde du travail, les personnes autistes vivent douloureusement l’épreuve d’une socialisation qui, en plus d’être une difficulté liée au trouble lui même, doit affronter la vile attitude de normotypiques en mal de cruauté. Comment sortir de ce paradoxe douloureux qui veut d’un côté ne pas exclure les enfants différents de l’école et de l’autre ne pas leur faire subir ce qui leur arrive et dont ils se plaignent tant : le harcèlement et autres avatars de la vie scolaire qu’ils racontent en consultation, sur les forums et dans les ouvrages autobiographiques ? État des lieux, enjeux, préconisations, programme noble et ambitieux de cette session (S06).

Demain, le futur ici présent

Lithium, bumétanide et immunomodulateurs sont au menu d’un symposium déployant l’éventail des recherches consacrées à la pharmacologie des TSA (S22). Pour le lithium, il s’agit d’une indication spécifique dans une forme syndromique liée aux mutations dans le gène SHANK 3. La bumétanide vise le rétablissement d’un contrôle inhibiteur du GABA en agissant sur les canaux au chlore et une étude a montré qu’elle améliorait certains symptômes centraux du TSA. La piste immunomodulatrice ne fait pas l’objet d’application thérapeutique concrète mais elle vise cet objectif en cherchant à préciser les résultats obtenus sur les facteurs inflammatoires qu’on pense impliqués dans la survenue de certains TSA.

Les acteurs de la santé connectée s’intéressent aux troubles du comportement alimentaire, à la nouvelle génération qui grandit avec les réseaux sociaux et les formes nouvelles d’influence qu’ils véhiculent. On peut apprendre à composer avec cela, à utiliser de la meilleure façon possible les supports existants, comme les applications dédiées aux personnes souffrant d’anorexie ou de boulimie. C’est l’objet d’un symposium (S27) parmi d’ autres consacrés à la clinique des TCA (S29, FA22).

Pour améliorer nos compétences de prescription, la SFPEDEA a ouvert une plate forme d’information et d’aide à la prescription des psychotropes dont on découvrira les principes et le fonctionnement (R09).

Le temps perdu des adolescents, imparfait du subjectif et oreille cassée

Perdus devant leurs écrans les adolescents n’ont-ils plus de temps à perdre, plus d’ennui rêveur ? Après avoir perdu une partie de l’être dans l’avoir, sont-ils en passe de dissoudre le reste dans le flux infini et addictif des réseaux ? Sollicités de plus en plus sur le mode de l’urgence, des équipes comme celles du CESA relèvent le défi d’un temps écrasé, sans espace pour exister (FA16). L’unité de soin Espace dédiée aux adolescents en situation de crise propose aussi des regards croisés sur la génération née dans les années 2000 où se rencontreront psychopathologie, anthropologie et philosophie (S30).

Perdu lui aussi le temps de dormir si important pour le développement statural et psychique de l’adolescent. Comment les rythmes sociaux et les rites familiaux peuvent-ils infléchir, contrarier la réduction et la désorganisation du sommeil adolescent ? Auteure d’ouvrages et d’articles consacrés aux rythmes de vie et aux rythmes scolaires, l’oratrice saura tenir en éveil ceux qui ne souhaitent pas abandonner les adolescents à leurs envahissantes passions virtuelles (FA12).

Pour terminer, si vous n’en croyez pas vos oreilles, découvrez comment les méthodes de compression sonore nuisent à l’audition, favorisent des niveaux élevés d’écoute qui altèrent les capacités auditives et dénaturent la qualité des musiques entendues (D07).

Sacrer le printemps de la vie…

 A l’altération globale de l’audition s’ajoute l’altération qualitative de la perception qui n’est plus exposée aux nuances de timbres et de volume des instruments et des voix. Il paraît que pour certaines musiques cela n’aurait aucune importance… Ne devrait-on pas quand même proposer à la sécurité sociale de rembourser des séances d’exposition dès l’enfance à Stravinsky, Ravel et autres orchestrateurs géniaux dans les meilleure salles de nos régions ?