30th ECNP Congress – Paris 2017
New psychoactive substances: ‘legal highs’, cognitive lows?
Conférencier(s) : Marta Torrens, Université de Barcelone, Michael Baumann, (NIDA, Baltimore, USA)

Les points forts :
  • Les NPS («New Psychoactive Substances») correspondent à diverses appellations : «designer drugs» = «legal highs» = «emergent drugs».
  • Le fait que les consommateurs ne savent pas ce qu’ils prennent est préoccupant.
  • Les produits consommés sont indétectables par les analyses toxicologiques urinaires habituelles.
  • Les effets aigus et chroniques sur la santé sont encore mal connus.

La promotion et la distribution des nouvelles substances psychoactives se fait surtout sur Internet, et pas seulement sur le « dark web ». Leur achat est très facile par ce canal, y compris en de grandes quantités (en kg…). Les principales substances sont maintenant connues : les cannabinoïdes de synthèse (par exemple « spice », « K2 »), agonistes complets des récepteurs cannabinoïdes, les stimulants de synthèse, notamment les cathinones (par exemple les « bath salts »), les hallucinogènes de synthèse, notamment les phénéthylamines, les opioïdes de synthèse, notamment les dérivés du fentanyl, par exemple le furanylfentanyl, les benzodiazépines, notamment le diclazépam et le pyrazolam. Tant qu’elles ne sont pas interdites, les nouvelles substances psychoactives sont vendues comme « légales ». Dès qu’elles sont interdites, d’autres prennent la place. Une nouvelle substance est identifiée par semaine.

Marta Torrens (Université de Barcelone) a exposé les données de l’European Drug Report de 2017 : les substances les plus consommées étaient les cathinones (33%), les cannabinoïdes de synthèse (29%), les benzodiazépines (11%) et les phénéthylamines (6%). Les consommateurs sont avant tout des 15-34 ans, « psychonautes » et des populations marginalisées à problèmes chroniques, rencontrés notamment dans les services d’Urgences. Elles sont consommées généralement avec d’autres produits, notamment l’alcool.

Les cathinones, notamment la méphédrone, sont utilisées dans un contexte de conduites à risque (HIV), chez les hommes qui ont des relations sexuelles avec des hommes, utilisées fréquemment par voie intraveineuse, appelées « chem sex » ou « slamming ». Les opioïdes de synthèse tels que le fentanyl dont l’affinité pour les récepteurs opiacés est forte, posent des problèmes de surdose (17 décès rapportés par l’EMCDDA en 2017). Cette substance se présente sous forme de poudre, de comprimés, de capsules, en liquide ou en spray.

Michael Baumann, (NIDA, Baltimore, USA) a exposé les caractéristiques d’une cathinone, la 3-4-MDPV ou méthylènedioxypyrovalérone. Chez l’animal, la 3-4-MDPV et son analogue l’alpha-MDPV, est un puissant inhibiteur de la recapture de la dopamine en bloquant le transporteur de dopamine (DAT). La DAT favorise la réentrée de la dopamine dans les cellules. Ces auteurs ont retrouvé une auto-administration de la 3-4-MDPV, similaire à celle observée pour la cocaïne (1). Elle est métabolisée rapidement par le cytochrome P450-2D6 et la COMT. Chez l’animal, le blocage de la DAT est corrélé aux taux plasmatiques de MDPV, mais pas des métabolites, et s’accompagne d’une augmentation de la locomotion. D’après l’auteur ces données s’appliquent parfaitement à l’homme.

David Wood (King’s College, London) a rappelé que dans l’European Drug Report et le World Drug Report de 2017, les données de toxicité aiguë des nouvelles substances psychoactives provenaient des études chez l’animal, des études in vitro, des case reports, des données fournies par les services d’Urgence et des centres anti-poisons (2), ainsi que des forums des usagers, par exemple l’enquête sur les drogues du magazine mixmag survey qui vise 150 000 participants.

Étudier ces substances est difficile. Aux Urgences, il est difficile d’identifier les substances à l’origine des comas, crises convulsives, troubles psychotiques, agitations, tachycardies, douleurs thoraciques… Même lorsqu’elles sont identifiées, l’absence de codage CIM-10 spécifique gène l’acquisition des connaissances. Les autres obstacles sont les difficultés d’obtenir des données toxicologiques, gold standard pour mener des études, et enfin la nécessité, difficile à obtenir en pratique du consentement des usagers. Le réseau Drug Emergencies Network (Euro-DEN), mis en place dans 10 pays européens en 2014, a rapporté que 10% des urgences étaient liées aux nouvelles substances psychoactives (3). Certains pays ont institué des dispositifs intéressants, notamment le Drug Information and Monitoring System (DIMS) monitoring, permettant d’analyser les substances et de fournir immédiatement les résultats aux usagers (4) En Suède, le STRIDA project effectue des analyses toxicologiques.

Johannes Ramaekers (Université de Maastricht) a exposé ses études de phase 1, évaluant certaines nouvelles substances psychoactives. Par exemple, le JWH-018 (« spice »), cannabinoïde de synthèse, a été administré, à doses augmentées très progressivement, à deux groupes de 6 sujets. Les études ont porté sur les effets subjectifs induits par le JWH-018 et les effets sur l’attention et le contrôle perceptivo-moteur (5). Les anomalies retrouvées étaient étroitement corrélées avec les erreurs constatées en conduite automobile. La concentration sanguine du JWH-018 baisse après trois à quatre heures comme pour le THC du cannabis traditionnel. Ces auteurs envisagent l’étude d’autres nouvelles substances psychoactives telles que la méphédrone et la 4-Fluoroamphetamine (4FA).