L’intérêt de la prise en charge intégrée, simultanée, des addictions et des troubles psychiatriques, notamment par les Equipes de Liaison et de soins en Addictologie (ELSA), est aujourd’hui bien établie. Celles-ci répondent efficacement à un besoin réel. Plusieurs communications au CFP à Nice vont aborder ces aspects, notamment alcool et troubles bipolaires, tabac et troubles psychiatriques, addictions et TDAH. D’autres symposiums sur les addictions aux écrans (S20) et le cannabis thérapeutique (S01) sont à la croisée des thématiques et font l’objet de commentaires dans d’autres rubriques.

Les points forts

  • Les groupes thérapeutiques destinés aux patients bipolaires alcoolodépendants se développent de plus en plus.
  • Très fréquents dans les addictions à l’alcool, aux opioïdes et comportementales, les TDAH justifient une évaluation systématique.
  • L’intérêt et les limites de l’efficacité du baclofène sont de mieux en mieux connus.

Alcool : données épidémiologiques, des applications pratiques ?

Un symposium présentera les données issues des études épidémiologiques récentes TEMPO et Constances en France et NESARC aux Etats-Unis (S24). Dans les trajectoires de consommation d’alcool de l’adolescence à l’âge adulte en France, l’étude TEMPO a souligné l’influence des inégalités sociales (S24A). L’étude Constances a retrouvé que les travailleurs au contact du public avaient plus de risques de binge drinking (hommes) ou de troubles de l’usage d’alcool (femmes) (S24B). Enfin, les données épidémiologiques permettent aujourd’hui de proposer une échelle composite évaluant le risque de six conséquences médico-psycho-sociales liées à la consommation excessive d’alcool, issue de l’AUDIT-C (S24C). 

Troubles cognitifs dans les addictions :
de mieux en mieux connus, de mieux en mieux pris en charge ?

Les troubles cognitifs liés à l’usage de substances sont très fréquents. Ils favorisent les rechutes, diminuent l’observance (les patients oublient les rendez-vous,…) et gênent la réinsertion sociale. Il n’est plus possible en 2019 de les ignorer. Il n’est pas facile de distinguer les troubles cognitifs induits par les substances de ceux liés aux troubles psychiatriques, très fréquemment rencontrés dans les addictions (S09B). Une session fera le point sur leur nature, troubles cognitifs classiques, biais cognitifs et cognitions sociales, sur leur classification (S09A), leur évaluation et leur prise en charge par remédiation cognitive, ciblée notamment sur le contrôle inhibiteur et les biais attentionnels liés aux substances (S09C). Dans ce cadre, la place des neuropsychologues, acteurs majeurs dans ce champ, malheureusement encore trop peu nombreux aujourd’hui, devrait logiquement s’accroître dans un futur proche.

Troubles bipolaires et troubles liés à l’alcool :
pathologies intriquées, prises en charge intégrées

Les troubles liés à l’alcool sont très fréquents au cours de l’évolution des troubles bipolaires. Des trajectoires cliniques des patients comorbides peuvent aujourd’hui être individualisées, par exemple celle des sujets dont les troubles liés à l’alcool précèdent les troubles bipolaires et caractérisés par un âge de début des troubles thymiques plus tardif et des scores plus élevés de dépression (S13A). Dans la perspective des soins intégrés, les premiers résultats de l’évaluation de groupes thérapeutiques de psychoéducation et de prévention de la rechute basée sur la pleine conscience pour des patients comorbides seront présentés (S13C). Les cibles thérapeutiques sont la rechute, la réactivité émotionnelle, l’anxiété, le sommeil, et les ruminations.

TDAH et addictions : y penser toujours

Les Troubles Déficit de l’Attention/Hyperactivité (TDAH) sont très fréquents dans les addictions et pas seulement dans les addictions à la cocaïne. On les retrouve dans les addictions à l’alcool, aux opioïdes, dans les addictions comportementales, notamment les addictions sexuelles, aux jeux d’argent, aux jeux vidéo et à l’alimentation. Une rencontre avec l’expert fera le point sur l’importance de dépister le TDAH chez les patients consultant pour des conduites addictives, notamment en raison du risque plus élevé de rechute, de co-addictions plus sévères et de mauvaise observance (R03).

Tabac et cannabis en psychiatrie :
aider les patients à gagner 10 à 25 ans d’espérance de vie

Le tabagisme est le facteur de morbidité et de mortalité prématurée le plus important chez les patients souffrant de schizophrénie, avec une espérance de vie réduite de 10 à 25 ans par le tabac. Celui-ci augmente les affections cardiovasculaires, respiratoires et les cancers de manière très importante dans cette population. D’où l’importance de connaitre les stratégies d’aide au sevrage tabagique et cannabique en psychiatrie qui seront détaillées dans un symposium (FA22) et dans un DPC (DPC1) organisés par la Société Française de Tabacologie.

Baclofène : après les controverses, quelle attitude adopter ?

Un an après l’autorisation de mise sur le marché du baclofène par l’Agence Nationale de Sécurité du Médicament et des produits de santé (ANSM) dans l’indication de la réduction de la consommation d’alcool des patients alcoolodépendants, sans dépasser 80 mg/jour, la France reste le seul pays ou ce médicament est autorisé. La raison est un manque de preuves, retrouvé dans plusieurs méta-analyses d’études contrôlées et randomisées en double-aveugle, notamment celle de Bschor et al. (2018) sur 14 études, comprenant 1522 patients et celle de Minozzi et al. (2018).

Un consensus de 26 experts (Cagliari Expert Consensus Group) a souligné, entre autres, que le baclofène était un médicament de deuxième ligne pour les patients n’ayant pas répondu aux médicaments de première ligne, sauf en cas de contre-indication, par exemple en cas d’insuffisance hépatique sévère qui contre-indiquent la naltrexone et le disulfirame. Le baclofène doit être commencé à faibles doses (5mg trois fois par jour et augmenté de 5 à 10 mg tous les trois jours (Agabio et al. 2018). Un symposium fera le point sur les recommandations de Cagliari (S14B) et l’utilisation du baclofène et d’autres agonistes des récepteurs GABA-B tels que l’oxybate de sodium (S14A, S14C).